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Média 2000 - Recherche action



Rien ne peut remplacer l'exercice pratique de l'enseignant de terrain, quand il s'agit d'identifier l'intérêt, mais aussi les modalités, difficultés et limites de l'intégration d'une nouvelle technologie dans la pratique pédagogique. Entreprendre une Recherche-Action, c'est refuser de mettre la charrue avant les boeufs, mais c'est aussi avancer en eaux profondes, car ce n'est qu'à partir du moment où l'on accepte de perdre quelque peu pied, que l'on cerne les vraies réalités.

C'est bien de cela qu'il s'agit : tester sur le terrain de tous les jours la faisabilité et l'intérêt de ces nouvelles techologies de l'information et de la communication, les NTIC, au service de la pédagogie. En effet, il ne manque pas de questions sur le sujet : le multimédia est-il un outil pédagogique opportun ? Faut-il stimuler son insertion dans les écoles ? A quel prix ? Pour soutenir quelle pédagogie ? Avec quel projet de société et d'éducation à la clef ? Et que dire des moyens financiers et humains à mobiliser pour ne pas faire des NTIC, une nouvelle réformette que les enseignants risquent de ne pas mieux digérer que l'introduction de l'informatique ou de l'audiovisuel ?

Déroulement du projet

Média 2000 a débuté en septembre 1995. Voilà donc deux années scolaires que certains enseignants de huit écoles fondamentales et secondaires, bénéficient d'un apport logistique de machines et de soft, dans des proportions réalistes (1) pour tenter de voir ce qu'on peut retirer comme gain de cet outillage nouveau. Ils sont un petit groupe, dans chaque établissement scolaire, général, technique ou professionnel, concentré autour de l'un ou l'autre qui avait déjà suivi une formation en Education aux Médias. Car le projet ne vise pas, loin de là, le seul enseignement assisté par ordinateur. C'est qu'il s'agit en effet de rejoindre le jeune dans une consommation médiatique moderne, pour l'aider à se construire un esprit critique, capable de comprendre le langage et les enjeux de ces nouvelles technologies de communication, et pourquoi pas, d'intervenir dans le débat de société, en s'exprimant lui aussi de façon moderne. Après une année tournée essentiellement vers la consultation de titres off-line (CD-I et CD-Rom), le projet s'est donné deux objectifs d'intégration complémentaires : l'exploitation de la mise en réseau (Internet, le Web mais aussi la correspondance électronique) et la production multimédia.

Phases d'évaluation


Au terme des six premiers mois, les machines qui avaient été rassemblées dans quatre écoles transitaient vers quatre autres qui prenaient le relai. L'évaluation intermédiaire permettait aux enseignants relayeurs de bénéficier de l'expérience des pionniers. Mais la liberté pédagogique laissée à chacun permettait d'exploiter l'outil selon sa pratique : ainsi certains optaient pour le rassemblement du matériel au sein d'un même local. L'organisation interne nécessitant de réserver celui-ci, mais obligeant à bien préparer le moment de son utilisation. D'autres optaient pour la dispersion des ressources, choisissant l'opportunité de solliciter ces nouvelles sources de savoir, selon les besoins, à la façon dont on le fait avec un dictionnaire ou une encyclopédie.
Au terme de la première année, un rapport intermédiaire paraissait qui faisait état de premières observations (2). Beaucoup de questions encore, ... mais qui se posaient, non plus de façon théorique, mais enracinées dans l'observation des pratiques de terrain. Faut-il investir rapidement et massivement dans les nouvelles technologies, ou attendre un moment plus propice et y aller progressivement ? Ne va-t-on pas alimenter une dualisation de la société, entre ceux qui savent et ceux qui ne savent pas,  mais aussi entre ceux qui possèdent et ceux qui ne possèderont jamais. L'intérêt, l'enthousiasme même, manifesté dès les premiers instants ne va-t-il pas s'estomper, une fois le caractère nouveau dépassé. Et Internet ? On en dit tant de choses ? Est-ce vrai que 90% des sites sont pédophiliques, ou pornographiques ? "En tout cas, il faudra prouver qu'on peut y trouver plus que dans un bon bouquin, sans quoi, c'est cher payer et beaucoup de temps perdu. Ne pas sacrifier aux modes. L'école a le devoir de résister !"

Après deux années, des pistes


Les enseignants qui ont franchi le pas ne le regrettent assurément pas. Certes, il leur a fallu râmer, pour le dire vulgairement. Pour certains, cela a été la galère, ils l'avouent. Mais il faut garder à l'esprit que plusieurs n'avaient jamais approché un ordinateur ! Saluons aussi la conviction qui l'emportait sur la déception de quatre années de revendications, tant qualitatives que quantitatives, qui n'aboutirent pas de façon satisfaisante. L'enthousiasme pédagogique prévalait. Aujourd'hui ils commencent d'être remerciés de cet investissement. Premier champ moissoné : les rapports interpersonnels. Avec les élèves, et entre enseignants, les liens ont changés. Certes, cela réclame une disponibilité nouvelle, à la limite de l'exploitation parfois. Mais contenues dans des proportions honnêtes, ces nouvelles relations sont l'illustration de deux choses : la valorisation de celui qui ouvre la route aux autres, tant l'élève que le collègue, et l'interpellation insistante d'élèves en projet et que l'avis d'une personne-ressource peut relancer dans son plan personnel d'apprentissage.

Créativité, quand tu nous tiens


Autre intérêt : la production multimédia. Cette deuxième année a été l'occasion de découvrir un logiciel-auteur dont la fonction principale est, par l'intégration de texte, mais aussi d'images de sons et parfois de séquences animées, de construire une séquence multimédia. L'intérêt manifestéest tel que les CD-Rom qui avaient servi de champs d'observation la première année,  se sont fortement réduits parfois, au rôle d'inspirateurs de projet. Quand il ne s'agit pas, purement et simplement d'y faire le relevé des défauts à éviter ! Adaper les contenus à son propre parcours. Mieux, se servir des médias de communication pour communiquer vraiment : transmettre son message, ... à un vrai public ! Quel programme !
Gageons aussi que les écoles qui viennent d'être raccordées à la mi-mars, à Internet, découvrirons le formidable enjeu qu'est la la correspondance électronique qui permet aux écoles notamment d'entrer en contact pour échanger des projets pédagogiques, ou en mener de concert. Et la publication de pages HTML (3), véritable vitrine personnalisée de l'établissement scolaire, de la classe, et pourquoi pas de chaque élève, donnant l'occasion de partager quelque chose de personnel avec l'ensemble du village global.

Et les savoirs ?


Au delà de l'aspect relationnel, se pose la question de l'apport pédagogique plus formatif. Y a-t-il de nouvelles compétences, ... à acquérir préalablement ? Ou qui proviennent de l'usage des NTIC ? Que faut-il évaluer : les savoirs ? Auquel cas, on s'interrogera par exemple sur la fiabilité d'une recherche documentaire sur le Web, qui glâne au petit bonheur la chance des infos éditées sans crédits véritables. Faut-il plutôt relever des savoir-faire nouveaux ? Y a-t-il véritablement convergence de ces NTIC et des demandes de niveaux de formation attendus par les établissements d'enseignement supérieur et universitaires, et par les entreprises qui accueillent nos élèves au terme de leur cursus ? On lira avec intérêt la réflexion de Marcel Lebrun à ce propos(4).  En tout cas, ce qui est constaté sur le terrain, c'est que tout le monde travaille énormément.

Apprendre, ... c'est une action


Les enseignants d'abord, dont les préparations sont la principale garantie d'un travail productif de l'élève. En effet, mettre un élève à l'ordinateur sans projet, sans questionnaire de recherche, sans consignes de travail, c'est lui faire dire au bout d'un court instant "ca y est M'sieur, j'ai fini, ... y a rien dans votre CD. ou sur Internet. J'en ai fait le tour !" Par contre, si la phase préparatoire est conséquente, la partie en classe est autrement occupée. C'est l'élève qui apprend. Le prof lui,  observe ses élèves, avec plus de disponibilité pour repérer et apprécier les stratégies mises en place, pour recentrer les parcours suivis, pour soulager les plus faibles, ... Disponibilité aussi abondamment sollicitée par les groupes d'élèves qui veulent vous entendre dans le débat qu'ils entretiennent devant l'écran, face à une décision à prendre. On clique ? On revient en arrière ? On tente une autre démarche ? Le prof. est l'accompagnateur d'un élève qui le sollicite, qui reconnaît ses besoins et qui donc affirme par là même être en phase de mobilisation.
Côté élève, les 50 minutes passent sans que l'oiseau-lyre ne fasse son cinéma. Idéalement d'ailleurs, il faut pouvoir disposer de deux fois cinquante minutes. La réalisation de projets demande de la perspective. Mais comme pour toiute chose, il y a un seuil à ne pas dépasser, l'excès nuit en tout. Attention à l'overdose. Variété des moyens pédagogiques, svp.

Mais, ... la technique, dites-moi !


Il est vrai que cela demeure le nerf de la guerre ! Et sa maîtrise ! Certes, les élèves ont souvent une bonne longueur d'avance sur leurs enseignants. Mais le retard se rattrappe. Ce qui par contre est un peu frustrant, c'est du moins ce que l'on constate dans Média 2000, c'est la nécessité de devoir toujours aller plus loin. Que les choses soient claires : ne pensez pas qu'introduire le multimédia à l'école se réduira à l'investissement -plus ou moins forcé- d'un poste multimédia et à quelques heures de formation. Car c'est comme une soif qui vous tenaille, elle se fait grandissante au fil des heures qui passent. Vous commencez par découvrir un CD-Rom. Puis vous constatez qu'il ne contient pas exactement ce que vous cherchez. Puis vous vous demandez si Internet, plus largement ouvert ne répondra pas mieux à vos exigences. Mais en découvrant le réseau, vous comprenez immédiatement l'intérêt de la communication électronique et des forums de discussion. Puis, votre curiosité et les usages pédagogiques vous font vous intéresser à l'édition HTML, à la capture d'images animées, au téléchargement de fichiers, ... d'applications, au rapatriement et à la production de sons. Bref, le virus vous gagne. Vous souhaitez alors que l'école investisse dans quelques machines de plus. Vous imaginez pouvoir les mettre en réseau. Puis se pose la question de la protection des informations. Et vous vous engouffrez dans la jungle des spécialistes :  format PDF, acrobat et autres avatars du Web. Ne soyez pas étonnés de vous voir sollicités par tous ceux que vous traînerez rapidement dans votre sillage : le surf technologique sur  cette nouvelle vague qui monte, qui monte. Difficle de tout évoquer dans un premier article, au lendemain d'une journée d'évaluation qui n'a pas encore été décantée. Alors je vous prends au mot ! Si vous voulez en savoir plus sur les enseignants de Média 2000. Branchez-vous. Visitez notre site Web. I relayera sous peu de plus amples nouvelles de cette Recherche-Action qui n'est pas achevée. Consultez donc notre adresse : http://educaumedia.comu.ucl.ac.be




(1) Ni plus, ni moins que ce qu'une école pourra vraisemblablement envisager sur fond propre, dans un avenir plus ou moins proche : 4 ou 5 machines multimédia.
(2) Ce rapport peut encore être obtenu auprès de Média Animation, 32, avenue Rogier, 1030 Bruxelles - contre remboursement des frais de port et jusqu'à rupture du stock.
(3) Le HyperText Markup Language est le langage utilisé pour éditer des pages sur le Web. Ces pages peuvent intégrer du texte, mais aussi des photos, des dessins,  et ... dans une plus faible mesure, des sons et des séquences animées. Car de la dimension des fichiers numériques, dépend la rapidité de rapatriement de ces informations via votre ligne téléphonique.
(4) Lebrun M.,  citation de sa contribution dans Forum n°    , sept 1997, page   .
 

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