Delicious,
Pearltree, Twitter, … se profilent comme de véritables chefs
d’orchestre d’une identification experte des sites répondant à vos
critères personnels de recherche. Encore devez-vous bien sélectionner
avec qui vous partagez l’exercice de cette veille intelligente. « Retour
sur investissement » garanti ? Qui sait…
Nous l’avons vu (voir notre analyse précédente),
les moteurs de recherche intègrent désormais les plébiscites de vos
amis dans leurs pages de résultats. Mais à côté de ceux qui rendent la
recherche en ligne plus sociale, il y a aussi de nouveaux outils qui
apparaissent [1].
Surfer sur Internet pour y chercher des informations, voilà un
réflexe devenu courant aujourd’hui. A tel point que certains pédagogues
s’inquiètent de ce « tout à l’ordi » qui s’installe parfois dans les
pratiques documentaires de leurs élèves. En effet, la recherche en ligne
pose toute une série de nouvelles questions liées à la spécificité des
nouvelles technologies, non seulement quant à la méthodologie de
recherche, mais aussi concernant le sens critique (un classique en
recherche documentaire) mais qui doit trouver sa déclinaison « online ».
Crédibilité des sources, recoupement des infos… Tout un art. Cela
justifie une longue et légitime réflexion, pour laquelle nous renvoyons à
nos analyses précédentes [2].
Ce que nous voulons mettre en évidence ici, c’est que ce temps passé et
cette expertise numérique acquise progressivement constituent un
capital intellectuel important, à tel point que plus d’un valorise
financièrement celui-ci dans des actes professionnels facturés. On
observera toutefois que la pratique en ligne des réseaux sociaux a
induit une autre manière de se comporter qui est sans doute toute aussi
intéressante : la veille ou l’expertise partagée. Selon quel modèle
économique, demanderez-vous peut-être ? Celui de l’échange entre pairs.
Un win-win non monnayé mais terriblement rentable.
Ça peut toujours servir
A côté des réseaux sociaux grand public qui prolongent sur Internet
les relations que vous entretenez dans la vie réelle, se développent de
plus en plus des réseaux experts qui ont comme objectif de mutualiser
des savoirs, des compétences, des ressources, etc… Il est un paramètre
important au coeur de ces pratiques : gagner du temps ! Non pas d’abord
dans le sens : « Time is money » mais plutôt en partant du constat que
de partager des infos au moment où elles vous tombent sous les yeux
prend bien moins de temps que de rechercher celles-ci (ou d’autres)
quand vous en avez fichtrement besoin et que vous êtes dans le rush
d’une tâche à réaliser. A la base de cette attitude : le réflexe du « ça
peut toujours servir… pour moi ou pour un autre ! » C’est d’ailleurs
selon ce principe que tout documentaliste constitue une base d’infos
qu’il consultera le temps venu. Nécessité, dès lors de "catalographier"
intelligemment de sorte à retrouver rapidement l’info stockée. C’est
déjà une pratique décisive à titre personnel. Cela le devient encore
plus dans un groupe de travail, au sein d’une entreprise ou d’une
association. Organiser la mise en partage des ressources documentaires
d’une équipe : un métier -métier bien connu : celui de bibliothécaire-
qui se décline de façon nouvelle depuis l’émergence des nouvelles
technologies de réseaux.
Découvrant une page internet particulièrement intéressante, je suis facilement en mesure d’en mémoriser l’adresse URL [3]
de sorte à y revenir en d’autres circonstances, notamment quand le
besoin sera plus sensible d’exploiter véritablement le contenu
informatif du document. La pratique est simple : je mets un signet, un
marque page, je « bookmarke », j’enregistre en favoris. Ces termes
désignent tous la même démarche. Mais ma référence est inscrite dans ma
machine, dans un fichier lié à mon navigateur. C’est seulement sur mon
ordinateur que j’en retrouverai l’usage. Si je veux partager l’URL
trouvée avec un collaborateur, la pratique est aussi simple : « J’envoie
vers » le lien de ladite page. Une fonctionnalité logée dans le menu
déroulant « Fichier » de mon navigateur. C’est un mail qui sera alors
adressé avec, en corps de message, l’hyperlien vers la page HTML
concernée. Je peux d’ailleurs m’envoyer de la sorte le lien, si je veux
le retrouver sur une autre machine que celle sur laquelle je suis occupé
à travailler. Celle de mon domicile, par exemple.
Se croiser sur un nuage…
Mais la pratique « dans les nuages », celle que l’on nomme de
l’anglicisme « Cloud computing » me permet depuis quelques temps déjà de
mémoriser mes favoris directement sur le net, accessibles dès lors de
n’importe quel poste connecté. A partir du moment où j’entre dans cette
logique d’un service en ligne qui fonctionne par session privée, je peux
opter (c’est un "opt in" [4])
pour le partage de cette info. En effet, si je communique l’adresse URL
de la page sur laquelle je stocke toutes mes bonnes adresses en ligne,
d’autres pourront en bénéficier. De plus, ils gagneront un temps
précieux si, se servant de mes mots-clés (des tags qui me permettent de
cataloguer et de retrouver mes liens par thèmes) ils interrogent ma base
de données personnelle. Dans cette logique, plusieurs utilisateurs
croisant leurs efforts respectifs seront encore plus performants.
Divers outils permettent ce partenariat de veille en ligne. Delicious [5] travaille dans une mise en page très textuelle alors que Pearltrees [6] visualise les choses de façon plus arborescente. Twitter [7]
publie par courts messages de 140 caractères maximum… Nécessité de
faire court et bon en intégrant le lien URL de la source en ligne que
l’on veut faire connaître à son réseau de contact (les followers). Ces
outils révolutionnent la recherche en ligne. Ils la développent dans un
sens social encore plus engagé. Le concept est bien que l’on échange des
ressources, ou à tout le moins que l’on en partage. Que ce soit de
façon mutuelle (deux à deux) ou non importe peu. Ce qui est essentiel,
c’est que celui qui veut bénéficier des apports documentaires de tels ou
tels puissent identifier les experts auxquels il accorde son crédit.
C’est finalement là que tout se joue, quand il s’agit de repérer les
leaders d’opinions qui vous conviennent. Car, comme les grosses machines
de guerre de la recherche documentaire en ligne (les Google et autres
Bing) l’instrumentalisent aussi, les référents experts sont différents
pour les uns et pour les autres. C’est vous qui acceptez la mise en
contact privilégiée au sein d’un réseau (« mes amis ») … et de ce fait,
les informations qui vous sont fournies ne sont pas les mêmes que celles
données en partage au sein d’une autre configuration réseau…
Renégocier ses supports
Dans ces configurations d’échanges experts, il importe de bien savoir
à l’école de qui l’on se met. En effet, toutes proportions gardées,
agir de la sorte revient à s’abonner à un journal (une ligne éditoriale)
plutôt que de re-choisir à chaque fois le support d’information que
l’on va consulter. Avantage indéniable point de vue temps. Mais risque
aussi de passer à côté de nouveautés qui surgiraient lors d’une
recherche que l’on effectuerait soi-même. Bien évidemment, ce choix de
vouloir suivre la ligne éditoriale (les favoris, les tweets ou les
arbres à perles) peut se renégocier… comme l’abonnement à un journal…
Encore faut-il en avoir la volonté et en prendre le temps… Nettoyer son
carnet de contacts est en effet une tâche que plus d’un reporte au
lendemain, comme pour d’autres, faire son lit ou ranger son garage.
L’apparition de ces outils sociaux de veille collaborative a
révolutionné la recherche d’infos de beaucoup. En effet, l’usage des
tags dans des plates-formes comme Delicious (appelés aussi hashtags dans
Twitter) autorisent une recherche standardisée dans une série de sites
internet qui ont été sélectionnés par des internautes motivés. Bien sûr,
quand on procède à partir de la page d’accueil d’un Twitter Search ou
de Delicious.com, les référenceurs sont l’ensemble des utilisateurs de
la plate-forme. Ils sont légion et vous ne connaissez pas leur degré
d’expertise. On n’est pas alors mieux loti en matière d’identification
des critères de plébiscite de tel ou tel site qu’avec un moteur
classique. Mais ces interfaces permettent la constitution de mini
réseaux… (l’équivalent de vos listes d’amis dans Facebook, par exemple).
Recommandations labellisées
Aussi, l’usage du moteur de recherche à l’intérieur des pages
référencées par vos relations privilégiées vous met-il en présence des
seules recommandations labellisées par vos contacts. Il est en effet
possible d’utiliser la recherche sur un mot-clé pour retrouver ses
propres favoris, de procéder de la même façon pour fouiller dans les
bonnes adresses des membres de vos mini réseaux ou enfin, pour
entreprendre une recherche dans l’ensemble des perles de la communauté
des utilisateurs de la plate-forme. C’est une riche collaboration qui
est ainsi rendue possible. Et puis, si vous partagez des affinités plus
particulières avec tel ou tel collaborateur, au sein d’une l’équipe
locale, mais aussi pourquoi pas à l’autre bout du monde, vous pouvez
suivre l’actualité de ses mises en favoris. La page Delicious de votre
collaborateur constitue le journalier de ses bonnes pêches sur le net,
comme le fait ses comptes Pearltrees ou Twitter.
Démarrer sa journée en surfant quelques moments sur ces ressources
bien choisies vous donne accès à une mine de renseignements actualisés…
et validés. Pas du temps perdu ! Vous découvrez ainsi une certaine
tendance du net, par l’intermédiaire de vos collaborateurs en veille. Et
à votre tour, quand vous découvrirez des informations que vous jugerez
de bonne facture, de haute valeur ajoutée, vous ne manquerez pas de
renvoyer l’ascenseur en les référençant, non seulement pour vous-mêmes
dans votre liste de favoris (ou de marque page, bookmarks…), mais aussi
avec l’idée que vous partagez par la même occasion –et sans que cela ne
vous coûte du temps supplémentaire- ces ressources pour une communauté
plus vaste qui fonctionne par échanges entre pairs.
Besoin d’un modèle économique à tout prix pour justifier votre
démarche ? Imaginez déjà le temps gagné à repérer toutes ces bonnes
adresses sur la toile, lesquelles arrivent à vous avec une validation
qualitative ! Mais dites-vous aussi que ces premiers contacts ne
resteront sans doute pas très longtemps sans lendemain. La mise en
réseau est classique pour les gens qui se connaissent déjà (Facebook en
est un bel exemple). Mais il y a fort à parier que la démarche
fonctionne de façon symétrique et que les contacts virtuels établis
entre personnes qui ne se connaissent pas encore débouchent sur des
opportunités de collaboration plus conséquentes dans la vie réelle. De
là à se rencontrer en présentiel… il n’y a sans doute qu’un pas qu’une
situation de travail ne manquera pas de susciter.
Retour gagnant, vraisemblablement !
Michel Berhin
Août 2011.
[1] Nous mettrons le focus sur Delicious, Pearltrees et Twitter sans affirmer que la liste s’arrête à ceux-là.
[2] Voir nos deux analyses précédentes, liées à ce sujet. http://www.media-animation.be/Les-reseaux-sociaux-entrent-en.html et http://www.media-animation.be/Partager-sa-veille-en-ligne-oui.html
[3]
Url signifie « Uniform Ressource Locator » en anglais et se traduit par
« repère uniforme de ressource ». Plus simplement, l’adresse
http://www…
[4] Voir : http://www.media-animation.be/Partager-sa-veille-en-ligne-oui.html
[5] http://www.delicious.com
[6] http://www.pearltrees.com
[7] http://www.twitter.com