Les formations – ateliers
Pygmalion : quand la formation produit son effet
Personnage légendaire de la mythologie grecque, Pygmalion était roi de Chypre. Sculpteur à ses heures, il tailla dans la pierre la statue d’une femme superbe et finit par tomber amoureux d’elle. Il demanda donc à Aphrodite, la déesse de la beauté et de l’amour, de donner vie à Galatée, ce qu’elle fit. Et le roi épousa sa sculpture ainsi transfigurée.
« Vous êtes forts, vous êtes beaux, vous êtes compétents. Je crois en vous. Ensemble, nous réussirons ». S’il fallait caricaturer à l’extrême une pédagogie tablant sur l’effet Pygmalion, voici une entrée en matière qui résumerait bien la démarche. La chose a été constatée : dans un processus de formation, les apprenants progressent mieux si le formateur donne tous les signes d’une conviction indéracinable en la capacité des apprenants et dans la réussite finale de chacun d’eux.
Pour décrire cette relation pédagogique particulière, on parle d’ « effet Pygmalion », en faisant référence au personnage de la mythologie grecque appelé Pygmalion. Ce roi de Chypres, sculpteur à ses heures, avait tellement espéré que sa statue prenne vie, qu’il en fut ainsi avec la bénédiction d’Aphrodite. Les pédagogues parlent aussi parfois de l’effet Rosenthal, du nom de ce chercheur et psychologue américain qui travailla sur les effets de prédiction formulés, anticipativement donc par le professeur, sur la réussite de ses élèves, et qui a constaté, expérience à l’appui, que les encouragés progressent plus que ceux que l’on maintient dans un jugement de médiocrité. Ces jugements a priori étant fondés ou non !
Formuler ainsi les choses, et les avoir vérifier ensuite, autorise aujourd’hui la reconnaissance d’une valeur suprême à la capacité d’empathie des formateurs avec leurs apprenants. Mesdames, messieurs les maîtres, les formateurs, les animateurs, les parents…vous avez une capacité d’influence colossale. Jouez-en avec intelligence et générosité. La réussite est au bout de votre choix pédagogique.
Une type de formation, qui table sur cette vision positivante des formés et sur leur capacité indéniable à aboutir, est ce que l’on pourrait appeler les « formations-chantiers ». Entendons par là des formations dont le programme prévoit la production finale d’un document ou d’un processus (un livret, une cassette, un journal, un spectacle, une émission…) dont la diffusion est déjà programmée avant même que la formation ne démarre. Le formateur énonce donc là « une prophétie à concrétiser tous ensemble » : la parution aura lieu. Le spectacle sera présenté. Le montage réalisé… Nous nous y engageons tous et pour cela, nous nous donnons les moyens d’arriver. Réussira-t-on ? Oui ! La chose est déjà annoncée dans son lancement. On doit réussir. Et dès le départ, tous, formateur et formés s’inscrivent dans un processus de réussite, de dépassement de soi et des difficultés qui émailleront inévitablement le parcours, dans une solidarité qui fait que tous réussiront, ou personne ! Et cela marche.
Bien sûr, la qualité du produit final n’est pas toujours au top de ce que l’on pourrait espérer. On réussirait certainement à augmenter la qualité finale du produit, mais aussi du processus, en sélectionnant la « crème » du groupe des formés… et en déclarant assez rapidement que certains ne seront pas du nombre, à l’arrivée.
Mais on le sait, c’est cette manière de sélectionner qui se retrouve déjà inconsciemment dans la pratique de la plupart des formations, quand on n’y prend garde. Quel que soit le niveau du groupe, après un démarrage en formation, il se dessine dans la tête de beaucoup de formateurs trois tiers : un groupe de forts, un groupe de moyens et un groupe d’insuffisants. La chose semble assez normale, dans la tête du pédagogue qui reconnaîtrait là le caractère inévitable de sélection dans un processus d’apprentissage, et qui donc, le légitimerait. La chose devient plus inquiétante quand, rassemblant les forts de trois groupes parallèles, le même formateur reproduit sa triple classification, déclarant que, parmi les forts, il y a trois tiers…
La relation pédagogique que l’on instaure peut donc présupposer divers scénarios, lesquels vont vraisemblablement se réaliser par la « force des choses ». Et donc, on n’applique pas la même pédagogie quand on prédit la réussite de chacun ou que l’on souscrit, consciemment ou non, à une catégorisation en groupes de niveaux (les trois tiers).
L’effet Pygmalion joue en effet dans les deux sens. La relation instaurée d’emblée peut faire grandir et humaniser Galatée. Elle peut aussi décider de son avenir, en la refoulant dans un des trois tiers : fort, moyen faible. Inévitablement.
Quel formateur souhaitez-vous être pour vos Galatées en puissance ? C’est une question de choix préalable. De type de relation pédagogique. Enclenchez-vous souvent des formations de type « chantier » où l’aboutissement est déjà annoncé, en commençant par dire : « Ensemble, nous réussirons ! » ?