Equiper...à la citoyenneté
interactive
Les pouvoirs régionaux ont décidé
d'équiper de façon systématique toutes les
écoles fondamentales et secondaires de plate-formes multimédia.
Parmi ceux qui s'en étonnent, il y a des parents qui pensent
que l'école doit d'abord s'occuper d'éducation
et des enseignants qui mettent la priorité sur l'apprentissage.
Mais y a-t-il véritablement photo entre ces finalités
?
Le plan Win d'équipement des écoles francophones
en est actuellement à la phase d'installation des sites
pilotes. Dans quelques mois, tous les établissements auront
réceptionné les machines à répartir
selon un cahier des charges précis.
Quatre salles pour quatre usages
Première installation : une salle de présentation
munie d'un ordinateur, d'un projecteur et d'une caméra
: c'est l'infrastructure de découverte frontale, en groupe
classe. Le professeur -ou un élève- manipule la
souris. A lui de ne pas nécessairement rester magistral,
mais d'interagir avec le groupe. (Voilà bien un mot fort
du multimédia). Un poste et une imprimante seront installés
dans le centre de documentation, pour permettre la recherche
documentaire sur cédéroms ou sur Internet. Un équipement
semblable et un scanner seront tenus à disposition des
enseignants, pour la préparation de leurs cours. Enfin,
une salle équipée du restant des machines, pour
un accès collectif.
Egalité des chances
Qu'il s'agisse de l'enseignant ou de l'élève
débutant, il y a lieu d'envisager un écolage à
l'introduction de cette nouvelle technologie à l'école.
Disons-le de suite, ce n'est pas le maniement informatique qui
fera peur aux jeunes, lesquels ont bien souvent une longueur
d'avance sur leurs aînés, parents et enseignants.
Il s'agit là de connaissances, de savoir-faire et d'expériences
acquises en dehors des murs scolaires qui ont dorénavant
besoin d'être reconnus, "confrontés",
mis en interaction avec les apprentissages et les connaissances
que l'école enseigne. Celle-ci ne peut plus considérer
les médias de masse comme un univers de culture parallèle
impertinent et qui ne la concerne pas. Elle doit au contraire
inclure leur réalité dans sa mission et lui reconnaître
une place légitime, sans quoi, elle laissera se développer
une population à deux vitesses : celle qui a accès
et l'autre. Mais plus grave encore, celle qui sait se servir
intelligemment de cette technologie et celle qui ne sait pas.
Nécessaire prolongement
Ce mouvement est déjà ancien, en pédagogie
: "Tout comme en Grèce, Socrate faisait de l'éducation
aux médias en développant avec ses disciples la
critique des "beaux discours" (dont ceux des sophistes),
l'école fait de l'éducation aux médias imprimés
depuis Gutenberg. L'éducation aux médias nous rappelle
aujourd'hui que de "nouveaux documents" enrichissent
la culture et qu'ils méritent d'être intégrés
de façon cohérente à l'école (1).
" Il poursuit : "Analyser la façon dont
le public "lit" le contenu médiatique et y réagit.,
nécessite le développement d'habiletés de
la pensée critique qui sont celles de la lecture, l'analyse,
l'interprétation, la compréhension et l'évaluation
des contenus . Peu importe le médium utilisé".
On pourrait dire, en paraphrasant l'auteur, qu'il faut en quelque
sorte reconnaître que ces nouveaux langages médiatiques
font partie de la "littérature contemporaine"
à côté des langages écrits et des
langages mathématiques. Reconnaître que les productions
de cet univers sont des occasions d'apprentissage véritables
et de comportement intelligent significatifs.
Tous médiacteurs
Derrière la tuyauterie technologique fournie, les enjeux
sociétaux sont donc de taille : permettre à l'enfant
de trouver sa place dans la société, en comprenant
mieux ce nouveau "jeu de la communication", mais également
en y prenant part en tant que citoyen responsable et créatif.
[Note]
(1) M. Pichette, responsable des questions d'Education aux
médias à l'université du Québec à
Montréal.