La vraie dualité est ailleurs
Vous reconnaîtrez rapidement ceux qui affichent les signes extérieurs de la dernière mutation technologique. Ils ont deux antennes sur le capot de leur voiture, un petit étui à la ceinture et une adresse Email sur leur carte de visite. Le Nec plus ultra réservé aux meilleurs : un site internet chez leur fournisseur d'accès. Face à eux, avec ton petit tamagoshi, tu fais figure de gamin, tu ne pourras jouer dans la cour des grands.
As-tu constaté la couverture médiatique dont les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) sont bénéficiaires ? Pas une revue qui n'en parle ! A se demander s'il n'y a pas là plus qu'un effet de mode. Selon certains, nous serions au coeur d'une nouvelle révolution copernicienne. Après la découverte du feu et l'invention de la roue, de l'électricité et du nucléaire, nous assisterions aujourd'hui, à l'émergence d'une nouvelle société, le village globale, où les transactions portent non plus en priorité sur les biens de consommations, mais bien sur les savoirs à haute valeur ajoutée. Ce nouvel instrument de collaboration interpersonnelle permettrait une mondialisation des échanges intellectuels au profit des nobles causes. Qu'en penser ?
NET... réserve ?
Bien entendu, comme pour toutes les découvertes, qu'il s'agisse de la pénicilline ou de la fission nucléaire, tout dépend de l'usage que l'on en fait. Et donc, nous pourrions immédiatement exprimer de nettes réserves face à l'optimisme ambiant qui annonce monts et merveilles en parlant des nouvelles technologies et principalement d'Internet. Et pourtant. Allons-nous hurler avec les loups ? D'un camp ou de l'autre d'ailleurs ! Condamnation unilatérale ou coups d'encensoir inconsidérés ?
Sans jouer les prophètes à propos de l'usage futur du Web, ne peut-on plutôt éveiller les consciences aux mérites de ce nouvel outil en espérant ainsi orienter les pratiques ?
Pas de quoi rire
Car une chose semble claire : l'essentiel n'est pas dans la possession de la technologie, mais dans son usage. Un usage pertinent, maîtrisé et performant. A oublier cette évidence, on nourrit des anecdotes qui disent toute la (dé)mesure de notre société de frime. Une dame prise dans un embouteillage, alors qu'elle allait chercher ses enfants à l'école, avise le conducteur du véhicule voisin qui dispose visiblement d'un téléphone mobile, afin de pouvoir prévenir de son retard. Confus, le monsieur s'excuse. Il aurait volontiers prêté "son G", si celui-ci n'avait été un faux ! (Véridique)
Eduquer aux médias
On sait la présence massive de la télévision dans des milieux familiaux financièrement peu aisés. Plus que la possession de l'objet, c'est la capacité à l'utiliser avec esprit critique qui pose question. Et l'école semble bien être le seul lieu qui puisse garantir dès l'enfance cette mise à distance : l'interprétation adéquate des productions du petit écran. Dans le même état d'esprit, Internet est un nouvel univers qu'il faudra appréhender et maîtriser avec lucidité. L'école va-t-elle y former le jeune ? Les mouvements de jeunesse vont-ils relayer cette mission d'éducation ? P. de Coubertin est fréquemment cité pour cet adage qu'on lui doit : "L'essentiel, c'est de participer". Va-t-on pourtant se contenter de dire que la présence sur le net suffit à elle-même. Souvent, les enjeux de société que l'on évoque en parlant des NTIC, sont cette dualisation entre ceux qui pourront se payer ces technologies et les autres.
Savoir bien plus qu'avoir
Soyons lucides, les tendances du marché évoluent vers une généralisation progressive de l'accès à ces instruments. Mais peu de choses sont réclamées en matière d'éducation à ces technologies. Or là se situe la vraie dualisation. Utiliser à bon escient et avec compétence ces nouveaux moyens de communication permettra, à ceux qui y auront été initiés dès leur plus jeune âge, de prendre créativement leur place dans la société de demain. Les autres ne pourront revendiquer qu'une présence artificielle sur le réseau, utilisateurs benets d'un système qui les grugera un peu plus, maintenus qu'ils seront dans une attitude de consommation, tarifée à la minute. S'il est vrai que demain l'économique obtiendra de l'évolution du marché que nous soyons tous possesseurs de ces nouvelles technologies, alors l'éducatif doit réclamer dès aujourd'hui que nous y soyons préparés. Là est le véritable enjeu de société. Sinon, la mondialisation des échanges intellectuels, ... on en reparlera !