Et toi, sur le net, tu mouilles aussi ton maillot ?
Début février, les kits Educaunet sont arrivés dans toutes les implantations scolaires de l’enseignement primaire. Les instits ont été invités à éveiller les enfants aux usages positifs de l’internet mais aussi, aux risques déboulant fortuitement sur les écrans. C’est qu’il s’agit d’être futé pour rester « safe ».
Je me souviendrai toujours de cette sensation qui m’habitait quand, au cours de gym, je dus apprendre à plonger. Avec le saut du grand tremplin, l’exercice incontournable était de ceux qui éveillaient en moi une frayeur telle que je me serais volontiers porté pâle. Tout répulsif qu’il me semblait, le défi qui m’était imposé assurait la mise en place d’apprentissages jugés nécessaires, à chercher sans doute du côté du « lâcher-prise » et de l’audace réfléchie.
En l’occurrence, pour la pratique de la nage, on comprend aisément le bien-fondé méthodologique qui impose que l’on mouille son maillot. Personne n’apprend à nager sur un tabouret ! Tout apprentissage devant parer à un danger potentiel requiert une confrontation minimale au risque encouru pour être efficace. D’autant bien sûr, qu’il s’envisage alors en milieu sécurisé, avec l’accompagnement de personnes compétentes. Il m’a donc fallu plonger à plusieurs reprises pour apprendre à me sentir à l’aise et compétent dans cette situation qui pourrait un jour se révéler d’urgence.
Mais quand il s’agit des risques liés à l’usage de l’Internet, certains s’interrogent encore. Faut-il nécessairement se jeter à l’eau ? N’y a-t-il pas moyen d’éviter cet exercice gênant (contenus préjudiciables, contacts interpersonnels malsains, propositions indélicates, frustrations diverses…) et ne profiter que du meilleur du Net. N’y a-t-il pas de bons filtres qui garantissent une sécurisation suffisante de notre jeunesse et nous dispensent de la confrontation ? Un apprentissage là où l’on a encore pied, quoi… équipé de brassards et bouées!
Dans un article intitulé « La maternelle au cœur de la prévention » (1) , voici comment s’exprime Françoise Héquet, présidente de l’antenne Prévention de la Mutuelle Assurance des Instituteurs de France: « En effet, c’est bien la moindre des choses que l’on puisse attendre de l’école que de garder les enfants sains et saufs dans ses murs. (…) Si, selon le dictionnaire, prévenir, c’est : “alerter, informer quelqu’un d’un événement imminent”, c’est aussi “aller au-devant de quelque chose pour l’empêcher”. C’est bien dans ces deux directions qu’il s’agit de travailler : enseigner, faire découvrir à l’enfant le monde qui l’entoure dans l’école et au-dehors.
La prévention active demande aux enfants de devenir “intellectuellement résistants” devant les tentations du groupe ou l’inconscience du danger. Elle a toute sa place à l’école et prend appui sur une réflexion transdisciplinaire pour tendre vers l’apprentissage de comportements adaptés et adaptables.
Il est aussi de la responsabilité de l’école, dès la maternelle, de mettre en place des démarches où la confiance en l’enfant soit permanente, et qui s’inscrivent dans une recherche de la plus grande autonomie. »
En natation, c’est en grande profondeur que l’on vérifie que les apprentissages sont acquis. Et ce n’est pas la pose de panneaux interdisant la baignade qui anéantira l’attrait du plan d’eau. Pire, l’interdit pousserait plutôt à la faute. De même pour Internet, c’est sur un réseau non nécessairement sécurisé que l’on doit pouvoir surfer en toute responsabilité. Et quand l’affichage préjudiciable se produit fortuitement, c’est alors que le jeune doit montrer qu’il a appris à réagir de façon responsable. C’est même tout habillé qu’il devrait apprendre à nager. Car hormis les situations de baignades estivales où l’on enfile le maillot de saison, c’est tout engoncé du poids de ses vêtements qu’il faut être capable de réagir quand l’accident fortuit vous flanque à l’eau. Non ?
Et vous, en formation, comment vous y prenez-vous pour penser les risques de sorte à les rendre moins dangereux ? Chacun reste-t-il sur le tabouret ? L’approche se fait-elle uniquement au tableau ? Comment conjuguez-vous sécurité de la procédure et confrontation vraie aux dangers à désamorcer ? Votre approche rend-t-elle les jeunes lucides, autonomes et confiants dans un vrai savoir-faire acquis. Au terme de vos activités d’apprentissages, sont-ils (r)assurés ou les avez-vous bercés d’illusions provoquant à l’avenir une téméraire audace irréfléchie.
Educaunet est un programme d’éducation critique aux risques liés à l’usage d’Internet. Les outils de ce kit pédagogique pour les 8-18 ans ne font pas l’évitement des dangers mais proposent un abord sécurisé permettant de penser le risque. Il peut être acquis au pris de 23 Euros à Média Animation, 32, avenue Rogier – 1030 Bruxelles – Tél : 02.242.57.93 - Voir aussi : www.educaunet.be
(1) www.educationenfantine.com/ L'Education enfantine est la revue pédagogique française de référence pour les enseignants de l'école maternelle. Créée en 1903, elle est disponible en kiosque et se décline sur le web.
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