Edito

Créé par John Barger en 1997, « Blog » est la contraction de « weblog ». On le prononcerait aussi bi-log (à l'anglaise). Les Québecois, eux, ont préféré la contraduction : "Joueb" pour "Journal web". D’autres, par chez nous, parlent de « Carnet en ligne ». Et de carnetiers et carnetosphère pour désigner les auteurs. En fait, l’usage du mot « blog » est devenu si répandu que le terme a récemment été proposé à l’Oxforf english dictionary. Son équivalent francophone est inscrit au Grand dictionnaire terminologique de l’Office de la langue française. Dans son « Guide du Carnet web rédigé à l’intention du néophyte » , Michel Dumais, weblogger, le définit ainsi : « Page Web évolutive et non-conformiste présentant des informations de toutes sortes, généralement sous forme de courts textes mis à jour régulièrement, et dont le contenu et la forme, très libres, restent à l'entière discrétion des auteurs ».
Com d’hab, t’es blog
Voici donc le web tel que certains le rêvent : contributif, ouvert à tous, impertinent. Et quand donc, cette nouveauté a-t-elle connu ses premiers développements ? « S'il fallait précisément dater le phénomène, du moins dans son ampleur actuelle, sans doute faudrait-il remonter jusqu'au 11 septembre 2001 et l'effondrement des deux tours . C'est du moins l'une des explications sur laquelle s'accordent les analystes, qui voient dans ce besoin de s'exprimer, et de connaître l'opinion de son voisin, la résultante du choc ressenti ce jour-là (1) ». Et le journaliste de conclure : « Sans pousser si loin la réflexion, sans doute peut-on aussi y voir le triomphe d'une formule simple, qui grâce à des outils faciles à manipuler, permet à tout un chacun de prendre la parole ».
L’année 2002 restera donc marquée par le boom des weblogs, ces carnets de bords ou journaux intimes que des centaines de milliers d'internautes publient sur la toile, ces "pages persos" d’un nouveau genre pour ceux qui souhaitent s'exprimer en ligne sans pour autant se perdre dans les problèmes techniques. Leur but ? Crier au monde leurs petites humeurs, dévoiler leurs profondes pensées, ou encore partager leurs dernières trouvailles sur un thème en particulier.
Comme le rapporte Alexandre Piquard (2), sur Transfert.net , « En pleine croissance, les blogs sont aussi devenus des outils qui dépassent largement le simple journal intime. Ils se développent entre autres dans le milieu scientifique et médiatique. De nombreux journalistes en éditent tous les jours, et y voient un moyen d'informer vite et de façon plus personnelle, en toute indépendance vis-à-vis de leur rédaction ».
Phénomène à ce point en pleine croissance qu’un Blog d’Or met en lice cette année 2003, pas moins de 813 inscrits concourant dans une dizaine de catégories thématiques (humoristique, journal intime, communautaire, actualités) et géographiques (africain, suisse, belge, français, québécois). Sans oublier la rubrique des inclassables !
Et puis qui dit « phénomène en croissance » dit automatiquement classement et recherche. Les weblogs francophones, pour ne parlez que d’eux, ont leur annuaire : c’est le déjà très utilisé : annublog.org/
Pompom sur le chapeau ou cerise sur le gâteau, c’est comme vous le voudrez, les milieux universitaires se penchent sur la réalité : ils l’étudient d’abord. Mentionnons le très sérieux travail de Sébastien Paquet, en cours de traduction de l’anglais par Dolorès TAM, sur le site des « Coups de langue de la grande rousse (3) ». Ils l’enseignent ensuite, et déjà depuis 2002… à l’Université de Berkeley, par exemple, qui offre un cours de journalisme portant sur la rédaction de carnets Web.
Le palmarès 2003 des Blogs d'Or est à l'image de l'univers des weblogs : hétéroclite. Pour faire une sélection qualitative, les internautes ont pu voter entre le 10 et le 31 mars derniers pour leurs weblogs favoris. A cette première session, 730 votes en ligne ont été enregistrés. « Un événement qui devrait prendre de l'ampleur dans les prochaines années, au regard de la déferlante des weblogs actuelle » conclut le « Journal du web (4)».
(1) L’internaute : http://www.linternaute.com/0redac_actu/0304_avril/11_weblog.shtml
(2) : Transfert.net : http://www.transfert.net/article.php3?id_article=8555
(3) : Les coups de langue de la Grande Rousse : PAQUET Sébastien, « La cognitique personnelle en ligne et son utilisation en recherche », Octobre 2002 : http://radio.weblogs.com/0105068/stories/2002/12/23/traductionDePersonalKnowledgePublishingAndItsUsesInResearch.html
(4) : Journal du web : http://www.journaldunet.com/0304/030409blogsdor.shtml
Emmanuelle et Cerise, juges de la blogosphère
<!--[if !supportLineBreakNewLine]--> <!--[endif]--> « L’an dernier, je rendais surtout hommage aux Canadiens et aux Belges. Ils ont toujours eu une longueur d'avance, et on leur doit une fière chandelle : sans eux, le Web et les blogues francophones seraient beaucoup moins développés. Cette année, je suis requinquée, ca bouge enfin. Le Web n'est plus réservé aux anglo-saxons, et aux tronches en informatique. C'est génial ». Emmanuelle Richard - 30 ans - correspondante de presse à Los Angeles – Membre du jury des Weblogs d’Or 2003 - Webmaster de Emmanuelle.net <!--[if !supportLineBreakNewLine]--> <!--[endif]--> « J'ai l'impression que de posséder un blog n'est pas seulement un effet de mode mais un réel besoin de se vider de ses problèmes quotidiens. Savoir qu'on sera lu, compris ou non, est une assurance sécurisante. Je pense cela surtout pour les journaux intimes ! » Cerise - 21 ans - webmaster de Urban02.net
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Carnetier, prends ton blog et gratte
La mise en ligne quotidienne de ses impressions ou de ses travaux, de son vécu ou du fruit de ses recherches se fait selon une tournure rédactionnelle très spécifique. Elle est en partie pré-programmée par les outils utilisés. Mais le genre littéraire du weblog en impose. Relevons les traits essentiels.
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<!--[if !supportLists]-->(1) <!--[endif]-->la responsabilité éditoriale de l’auteur
Il est clair que, comme tout journal intime, la ligne éditoriale appartient à celui qui tient la plume. Pourtant, il n’est pas question de tout se permettre… On est toujours bien dans un état de droits (avec ses obligations légales) d’autant que la sanction viendra aussi inévitablement du lectorat. Autant ne pas déborder inconsidérément.
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<!--[if !supportLists]-->(2) <!--[endif]-->une structure hypertextuelle
En effet, le weblog a comme caractéristique d’être relié à d’autres. Les lecteurs peuvent faire partie d’un « ring » ou afficher, dès leur premier écran, un blogroll (liste des blogs qu’ils suivent eux-mêmes comme lecteurs, et auxquels ils ne manquent inévitablement pas de faire référence).
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3. une mise à jour fréquente et dans un ordre chronologique inversé
Le message le plus récent s’affiche en haut de l’écran, bien sûr. Inutile de vous fatiguer à chercher le « post » d’une fin de liste, tout en bas.
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<!--[if !supportLists]-->4. <!--[endif]-->un accès public et gratuit au contenu
Bien évidemment. Encore que certains créneaux de la publication en ligne se servent aujourd’hui du « genre » weblog pour publier des infos que l’internaute consultera en pay per view.
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<!--[if !supportLists]-->5. <!--[endif]-->un archivage
Si les derniers « posts » sont accessibles dans une liste débordant quelque peu d’une hauteur d’écran, ou de quelques pages successives, l’ensemble se présente en archives. L’accès se fait alors en remplissant un formulaire spécifiant soit la date (en cochant sur un jour calendrier dans une grille mensuelle parfois), soit un mot-clé
Un petit Weblog, ça rapporte gros ?
Thuan Huynh, journaliste sur le web écrit pour le JDN (1) que « certains grands quotidiens en ligne s'essaient désormais au "weblogging". Une solution pratique qui leur permet notamment d'ouvrir un espace dédié à leurs grands reporters ou à leurs spécialistes qui peuvent directement publier en ligne des analyses ou des commentaires ». Sur le site du New York Times, par exemple, Paul Krugman, nominé au Prix Nobel d'économie, bénéficie d'un tel dispositif. Sur le site d'ABC News, les journalistes de la rédaction internationale disposent également d'un weblog. D'autres sites d'information en ligne proposent même à leurs lecteurs de devenir leurs chroniqueurs. C'est le cas de « Salon.com », pionnier du magazine en ligne aux Etats-Unis, qui a lancé une offre de weblogging payante en juillet dernier.
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<!--[if !supportLists]-->(3) <!--[endif]-->Journal du Net : http://www.journaldunet.com/0209/020910blog.shtml
Fort de son succès, parfois, le blog débloque
Certains weblog se conçoivent comme de véritables forums. Les outils d’édition utilisés sont d’ailleurs des interfaces en PHP, telles qu’on les utilise dans les news (avec base de données et contributeurs multiples, sous accès sécurisé). C’est le cas de « Café salé (1) ». Au départ, en septembre 2002 , Benga et Kness (29 et 23 ans), tous deux issus du monde professionnel de l’illustration (designer, comicker…) mettent en ligne un espace de rencontre. Leur plan ? « Si vous connaissez un auteur qui peut intéresser tout le monde, qui mérite l'attention, qui sort de l'ordinaire ou qui est méconnu, c'est ici qu'il faut en parler! » Ou encore, dans la rubrique « Speed painting », il s'agit de « réaliser des images sous photoshop ou painter, avec une contrainte de temps en général, afin d'obtenir quelque chose de très brut et à la fois de très équilibré… » Bref, des échanges entre crayonneurs, graphistes, painteurs… histoire de montrer ce qu’on fait et de recevoir des commentaires.
Un mois plus tard, ils sont déjà une quarantaine à s’envoyer des « papiers ». Quoi de plus normal, les amis s’associent à l’aventure. Mais un an plus tard, le blog a littéralement explosé et la ruche bourdonne : « Nos membres ont posté un total de 66879 messages. Nous avons 797 membres enregistrés. Le record du nombre d'utilisateurs en ligne a été de 4,3, atteint le Ven 50 Sept 2003 à 1:23 pm ». Les administrateurs interviennent quotidiennement. Bengal comptabilise 2581 messages, soit 3.86% du total et un ratio de 7.17 messages par jour. Kness n’est pas en reste : 2300 messages, soit 3.44% du total et un ratio de 6.39 messages par jour. Ce n’est pas à Hamo (étudiant en Bd-illu-infographie) qu’il faut dire « Café salé, tu verras, tu ne pourras plus t’en séparer ». Il n’est là que depuis deux mois et comptabilise déjà 419 messages. Son ratio de 8.22 messages par jour est déjà supérieur à ceux des administrateurs ! Un weblog comme celui-là… c’est la déferlante.
(1) http://www.cafesale.net/