Témoignage
Le contexte scolaire dans lequel intervient l’enseignant est assez différent de celui du formateur à l’animation en organisation de jeunesse. De cette différence de lieu, mais aussi de la différence de finalité et de moyens, parlons un peu. Sans oublier pour autant les similitudes qui proviennent de ce qu’il s’agit toujours d’apprentissages et d’éducation.
12-15-19-5 et le complémentaire 3. Voilà mon lotto à moi. Douze années passées en mouvements de jeunesse à être formé et à éduquer des enfants par le jeu, la créativité, le projet. Quinze autres années, vécues dans l’enseignement secondaire avec ces mêmes jeunes, assumant à leur tour des responsabilités d’animateurs de section. 19 années d’éducation parentale et 5 ans de formation d’adultes en Education aux médias. Le parcours mêle à la fois formation et éducation, apprentissage et animation. Et le complémentaire, direz-vous ! 3 ans d’éducation canine qui, loin du dressage, m’ont également appris beaucoup sur les conditions d’apprentissage.
Sans ignorer les traditionnelles difficultés d’un début de carrière dans l’enseignement, ma pratique a bénéficié de l’aisance que l’on reconnaît à ceux qui sont passés par les mouvements de jeunesse. Et pourtant, enseigner et animer sont deux fonctions s’exerçant dans des contextes très différents. L’établissement scolaire n’a que peu à voir avec le poste ou la section. Les cursus sont loin d’accorder toute la place que l’animation reconnaît à la créativité, au jeu, au projet, à l’esprit d’aventure et d’équipe. A cette différence méthodologique s’ajoute la distinction de finalité : l’école certifie des compétences et prépare des profils professionnels, dit-on, alors que les mouvements d’éducation…
Et pourtant, sur les C.V. des candidats à l’embauche, il apparaît aujourd’hui de plus en plus qu’antécédents scolaires et d’animation sont tout autant mis en évidence. Les employeurs le savent, ces deux parcours complémentaires sont, chacun à leur façon, de véritables temps de formation et d’éducation de l’individu, lesquels rejaillissent immanquablement sur la pratique professionnelle.
C’est un collègue enseignant qui me l’avait affirmé sans embage: « Tu verras, tu n’enseigneras plus de la même façon, quand tes élèves auront l’âge de tes enfants ». C’était un appel à découvrir progressivement que dans tout enseignant doit se tenir en éveil le parent, l’animateur, le guide… car c’est le même enfant, le même jeune dont on est en train d’accompagner la croissance et la construction. Les enseignants se plaignent parfois d’avoir à assumer cette tâche qui déborde de leur formation initiale et des plages horaires de leurs attributions. Mais cela fait bien partie de leur rôle. Le décret Mission dit bien « éduquer » et « éduquer tout l’homme, … en faire un citoyen pour demain ».
Et le parcours en association de jeunesse alors ? S’il ne prépare pas de profil professionnel, il est tout autant constitutif de l’identité de l’individu. Personnellement, je ne sais si j’ai autant appris à l’école que de la vie dans ma sizaine, de ma patrouille ou de mon staff. Mon profil d’homme, de parent, de formateur, c’est d’abord là qu’il s’est forgé. C’est dire toute la responsabilité qui incombe aux animateurs de mouvements de jeunesse.
Scout toujours, tantôt enseignant, tantôt animateur et éducateur… j’accompagne aujourd’hui des enseignants qui retournent sur les bancs de l’école. Ma pratique s’inspire de cette expérience passée d’animation et d’éducation. Comme le maître-chien qui fait équipe avec son compagnon à quatre pattes, il s’agit d’éduquer par l’accumulation d’expériences positives et valorisantes, la réussite appelant la réussite, et le dépassement de soi. Formateurs et enseignants, on fait un métier formidable !
Uploading ....